Actuellement au fin fond d'une forêt un peu avant Hannover en Allemagne, je continue mon récit.
Samedi 1er août : Shark museum et street art à Hellissandur
Aujourd’hui, pas de vent mais temps gris et petite pluie toute la journée.
Par la 54 nous traversons un grand champ de lave
pour aller visiter le musée du requin à Bjarnarhöfn sur la péninsule de Snæfellsnes
C’est une petite entreprise familiale qui depuis plusieurs générations pêchait et maintenant achète des requins pour les traiter et commercialiser leur viande en tout petits cubes.
La visite se fait au milieu de matériel de pêche divers puis continue par un film sur la façon de conserver la viande des requins.
Les requins utilisés s’appellent des requins du Groenland. Ce sont les plus grands de la famille des Somniosidés. C’est le plus gros requin du monde avec une taille maximale de 7 m et un poids de 1200 kg. Son espérance de vie est d’au moins 272 ans.
La chasse aux requins a commencé en Islande au XIVe siècle. Les islandais utilisaient le foie du requin pour en extraire l’huile pour les lampes à huile. L’huile de requin était de meilleure qualité que l’huile de foie de baleine. Elle brûle plus lentement et laisse moins de sel dans la lampe. Elle était surtout vendue à des personnes riches d’Europe.
L’huile de foie de requin a été l’une des plus grandes exportations de l’Islande pendant 600 ans.
Lorsque l’électricité est arrivée, l’huile de requin a progressivement perdu de sa popularité jusqu’à ce que la chasse au requin s’arrête définitivement en 1950. Depuis cette date les producteurs de requins comptent uniquement sur les captures accidentelles.
Ici à Bjarnarhöfn, ils les achètent au port de Reykjavik puis ils les amènent avec une remorque ou un camion.
Du XIV au XVIe siècle, la viande de requin n’était pas consommée à cause de sa toxicité. Les islandais avaient l’habitude de tout jeter en l’enterrant sous terre.
Autour du XVIe siècle, les islandais ont compris comment faire fermenter le requin, mais il y a un manque de documentation concernant l’évènement précis. Depuis lors, la viande a commencé à être consommée comme digestif ou complément alimentaire.
Jusqu’au siècle dernier, la viande a été fermentée en l’enterrant sous les rochers de la plage pendant des mois,alors que maintenant ils utilisent des caisses en bois. La réaction chimique est la même mais la méthode est plus simple.
Le processus
Le requin du Groenland est également le requin le plus toxique de tous : s’il est consommé frais, il peut être mortel pour l’homme.
Ceci est dû au contenu élevé d’urée et d’oxyde de triméthylamine dans l’organisme, qui permet au requin de survivre dans les eaux salées (en créant un équilibre osmotique) et de servir d’antigel naturel en stabilisant les enzymes et les protéines des tissus du requin du Groenland. Lorsque le requin rencontre des conditions extrêmement profondes et froides, cela empêche la formation de cristaux de glace qui perturberaient les parois cellulaires et provoqueraient l’explosion des cellules, entraînant des dommages aux tissus et aux organes, puis la mort.
Fermentation
Pour se débarrasser des toxines, ils mettent la viande dans les boîtes en bois et ils les laissent dans une salle de stockage pendant 6 à 9 semaines. Pendant le froid hivernal, la viande fermente; l’urine et l’antigel se transforment en ammoniaque, grâce à certaines bactéries responsables de la fermentation.
Séchage
Après la fermentation la viande est mise à sécher à l’air libre pendant 3 à 4 mois, pendant lesquels l’ammoniaque s’évapore, laissant une croûte orange / brune autour de la viande.
Néanmoins, l’ammoniac ne s’évapore pas complètement, laissant une odeur intense célèbre et un arrière-goût que certaines personnes comparent à un fromage fort.
La fermentation ne peut se faire que l’hiver, mais le séchage toute l’année.
Un peu plus loin d’ailleurs à l’extérieur on aperçoit le séchoir avec des morceaux de viande qui sèchent entourés d’une certaine odeur rappelant celle d’un urinoir mal lavé
Après la visite et les explications, les volontaires ont droit à une dégustation. En fait ce n’est pas très fort, comparable en effet à un fromage très fort, l’odeur d’urine n’étant pas présente dans la viande.
On pouvait aussi en acheter, mais ça ne nous a pas suffisamment convaincu.
Il y avait aussi de très belles mâchoires de requins
Nous reprenons la 54
et arrivons aux cascades de Kirkjufell, hélas les nuages sont bas et cachent le sommet
La pluie nous pousse jusqu’à Ólafsvík avec sa jolie église moderne
et son port où des enfants sautent depuis des bateaux de plaisance dans l’eau froide du port, sous l’oeil complice de leurs parents
Nous nous promenons dans le port désert de Rif, seulement habité par une myriade d’oiseaux
On voit tellement d’oiseaux qu’il y a sur le bord de la route, un panneau demandant aux automobilistes de rouler à 30 km/h
mais malgré cela on peut voir beaucoup d’oiseaux écrasés ou percutés.
Un peu en dehors de la route, perdue au milieu des lupins hélas défleuris, la petite église de Ingjaldshólskirkja
Nous finirons au camping d’Hellissandur, près d’un petit musée maritime
après avoir fait le tour d’entrepôts repeints par des artistes de street art
et une sculpture évoquant à la fois un bateau viking et un oiseau, selon comment on le regarde
