Turquie septembre 2012
Posté : sam. 6 oct. 2012 22:32
Nous avions déjà visité deux fois Istanbul et trois fois l’Anatolie. D’abord la Cappadoce et le littoral méditerranéen, puis l’extrême Nord-Est et Est de l’Anatolie, puis enfin une rapide traversée au retour d’un voyage en Syrie-Jordanie en mai 2011 (bateau retour Tartous-Venise sauvagement supprimé).
Chaque fois, nous avons été subjugués par la beauté des paysages, l’accueil et la gentillesse de Turcs, et les facilités de bivouacs, ravitaillement, eau, qualité des pistes, etc… Le pays idéal pour des nomades de notre genre. Mieux qu’au Maroc ! Nous sommes pourtant des passionnés de ce pays, aussi.
Lorsque j’ai découvert le reportage de Mouton sur ce site, j’ai été intéressé par son approche moins convenue que celle de beaucoup de « touristes », et surtout par les pistes de forêt et de montagne qu’il avait pratiquées en dehors de chemins touristiques les plus courus.
Nous sommes donc partis au petit bonheur, en se disant qu’on verrait bien ce que donneraient ces pistes. Eh bien, nous fûmes ravis… En voici le résumé, voir https://picasaweb.google.com/lfalfa7/Turquie2012LN" pour les photos (…et voir Le Routard et Lonely Planet pour les autres détails pour les sites les plus courus).
Départ le 2 septembre de notre maison en Belgique, traversée (pénible car longue et inconfortable) de l’Allemagne, Autriche, Slovénie, Croatie, Serbie, Macédoine, et Grèce, pour arriver le 4 au soir sur un spot que nous connaissons à proximité de Stavros, à l’est de Thessaloniki : une plage de galets, déserte, parfaite, accessible aux 4x4. Le rêve, quoi… Se réveiller à 10 mètres d’une mer d’huile, face au soleil levant, sans un nuage… Nous les Belges, on apprécie. Du coup nous resterons un jour de plus, histoire de se reposer des trois premiers jours de galère et des 2400 kms déjà abattus.
Auparavant, nous avions bivouaqué sur une aire d’autoroute en Autriche, relativement tranquille et sécure, puis près d’un soi-disant motel, dans un terrain vague le long de l’autoroute au sud de Belgrade.
De Stavros, nous reprenons l’autoroute vers Alexandropoli, puis Cannakale sur le détroit des Dardanelles. Nous bivouaquerons dans un champ fauché, au milieu d’une forêt de pins. Nous passons le bac sans histoire, puis descendons le long de la côte (Troie, etc…) sans grand intérêt jusque la petite ville anciennement grecque de Assos, avec son minuscule port, 2 kms plus loin. Un bijou, mais assez couru, à voir le nombre de restaurants et auberges (de charme) les pieds dans l’eau.
Nous bivouaquons un peu plus loin au bord de la mer, entre deux villas. Manifestement tout le littoral est privé, dans ce coin. Nous zappons Bergame et Ephèse, connus, pour nous retrouver sur un cap venteux au possible, près de Karine, en face de Lesbos. Nous y bivouaquons, peinards, mais devons rabattre le toit de l’Azalai, tellement le vent est fort et fait bouger le camion.
Le lendemain, après avoir visité le site de Priène, superbe !, nous piquons vers le lac d’Héraklia pour attaquer deux jours de piste « Mouton ». Le site au bord du lac est original, ruines moyenâgeuses, remparts, monastères byzantins, et d’étranges tombes (lyciennes ?) creusées dans le roc. Nous bivouaquons dans un village abandonné au bout du bout de la trace « Mouton ». Attention au bord du lac : facile de s’y embourber !
De là, nous repartons par du goudron, puis des pistes de forêt dans la montagne. Il y a des ruches partout. Des apiculteurs y travaillent et semblent surpris de nous voir. Grands sourires et gestes de bienvenue (le Turc est décidément incompréhensible pour nous, dommage !). Nous tombons en pleine forêt sur un cimetière déjà photographié par Mouton, puis sur des villages pas évident à traverser. Avec un peu de vaseline, ça passe… Les pistes sont assez confortable, et bien qu’en montagne, assez sablonneuses : en fait la roche, micacée, est assez friable et s’émiette au passage des véhicules. Nous bivouaquons près d’une fontaine, dans une clairière idéalement située. A peine entend-on le muezzin au loin. Comme à plusieurs reprises, notre petit campement est traversé au crépuscule par un ou des troupeaux de chèvres ou moutons.
Pour ceux qui n’on pas encore pratiqué la Turquie, il faut savoir qu’absolument partout, on trouve des fontaines ou des sources d’eau propre et probablement potable, débitant même en fin d’été comme en ce mois de septembre. C’est très pratique, et finalement bien mieux et plus propre qu’au camping… (Pas de dentifrice inconnu collé au fond du lavabo). Pratique pour ravitailler, ou même faire sa toilette (ou celle des légumes). Souvent des gobelets sont attachés près du robinet ou du tuyau.
Respects pour Mouton ! Ses traces sont on ne peut plus fiables et pourtant à plusieurs endroits, nous sommes tombés sur des fourchettes ou des carrefours qui laissaient perplexes. Comment s’est-il débrouillé pour ouvrir cette route. En ce qui me concerne, suivre une piste sur base de la trace sous Ozi, avec les cartes détaillées que j’avais dégotées sur le net, constituait une méthode pour le moins confortable que je n’avais encore jamais pratiquée : aucun jardinage, … et aucun mérite.
Nous débouchons finalement sur la meringue de Pamukkale, que j’avais toujours refusé de visiter, vu le nombre de cars de touristes dans les parkings. Mais finalement, cette fois, au coucher de soleil, en septembre, en dehors des grandes foules, nous nous sommes décidés, et cela valait vraiment le coup. A part que cela se pratique pieds nus, et que le calcaire est relativement râpeux…. Donc, contents de remettre ses chaussures après la visite, et pieds sensibles le lendemain.
Re-pistes dans les montagnes, quelques lacs plus ou moins salés, et petit crochet par Atabey pour visiter la vieille mosquée en bois et la medersa avoisinante. Pas un chat, décor bucolique, accueil sympathique par l’imam, jardins, fontaines, une ambiance incroyable de tranquillité et de paix. Dans les murs de pierre, de nombreuses traces de sculpture antiques ou croix de Malte : récupération.
Ensuite, petit détour sur la presqu’île d’Isparta et un déjeuner à base de carpe du lac (bon), puis montée vers Aksu dans un petit coin que je connais bien dans les montagnes. Nous y resterons deux jours à flâner, bouquiner, et ne rien faire d’autre qu’un délicieux tajine d’agneau sous des milliards d’étoiles.
De là, routes vers Beysehir, Konya, le caravansérail de Sultanhani, puis retrouvailles avec la Cappadoce que nous connaissions déjà. Après avoir bivouaqué en bordure de la vallée d’Ilhara, nous zappons le triangle Nesehir, Avanos, Urgup (ajoutez des trémas un peu partout) pour visiter plus en détail Mustafapasa , ancienne ville grecque abandonnée en 1926 (superbe cathédrale orthodoxe grecque) et Ayvali, charmant village typique . Nous trouverons une petite vallée pleine de grottes, habitations troglodytes et églises peintes, hors des circuits touristiques habituels. Nous bivouaquerons donc en plein milieu de ce décor. Pas un chat.
Nous repartons ensuite plein Est vers Sivas et Divrigli. La route est longue, en pleine steppe. Pas un arbre. Nous aurons du mal à trouver un endroit de bivouac. Finalement, nous trouverons notre bonheur au bord d’une petite rivière dans un champ moissonné.
Le lendemain, nous arrivons, via Kangal (voir plus loin), à Divrigli. Nous y visiterons une mosquée et un hôpital psychiatrique du 13ème sciècle, absolument fabuleux (voir photos). Dommage que ce soit si isolé de tout autre point d’intérêt.
Nous repartons alors plein sud pour nous retrouver empêtrés dans un chantier de route (4 bandes, comme toujours) en pleine montagne. L’horreur : trous, bosses et fosses, détournements, traversées d’engins en tous genres, etc… Après quelques heures harassantes, nous en sortons, puis reprenons plein Ouest vers Elbistan.
Ce soir là, alors que nous bivouaquons en pleine pampa, nous entendons au loin les clochettes d’un troupeau de chèvres. Quelques minutes plus tard, deux énormes chiens, de véritables veaux, déboulent en grondant, l’échine hérissée, pissant un peu partout et grattant le sol de leurs pattes pour bien marquer leur territoire. Lentement, ils se sont approchés jusqu’à 5 mètres en faisant leur cinéma. Nous avons toujours eu de grands chiens à la maison, du temps où nous voyagions moins : groenendaals, bouvier bernois. Nous étions donc décidés à ne pas nous en laisser conter. Donc, pas moufter, et ne pas les regarder dans les yeux…N’empêche, mon sudoku dans une main, ma bombe au poivre dans l’autre, je n’en menais pas large. Le cinéma a duré dix minutes, puis les deux fauves, superbes bêtes, ont enfin été se coucher à 20 mètres pour continuer leur surveillance. Le lendemain matin, ils n’étaient plus là… Je vous suggère d’aller voir Google- Wikipedia, à « Kangal », et vous comprendrez… Dommage, j’ai même pas pensé faire de photos.
Quelques centaines de kms plus loin, nous passons au pied du mont Argée, près de Develi (Kayseri). Ce volcan de près de 4000 m est à l’origine de la Cappadoce : ses émissions de poussières ont un jour créé le tuf dans lequel sont creusés tous les sites de Cappadoce. Impressionnant.
Tard le soir, nous arrivons sur Nigde. Grosse ville. Echangeurs d’autoroutes. Industries. Nous sommes mal embarqués pour trouver vite et bien un endroit de bivouac. A ce moment, Nady découvre dans le Routard qu’il y a un site à visiter tout près, au monastère d’Eski Gumus. Nous nous y rendons dans l’espoir premier de trouver un parking isolé pour bivouaquer. Excellente idée. Nous tombons sur un village entourant une montagne de tuf qui semble contenir des grottes, comme en Cappadoce. Dans le noir, nous trouvons un chemin de terre escarpé et désert qui monte au sommet de ce site. Et là, nous débouchons sur un plateau déjà occupé par … un motorhome français qui a eu la même idée que nous. En fait, le lendemain, nous visitons le site et découvrons un monastère troglodyte, de loin le plus beau de Cappadoce, avec les peintures les mieux conservées que nous ayons vues. A voir.
De là, nous continuons plein Ouest, pour retrouver une piste «Mouton » au sud de Seydisehir, vers Alanya, sur la Méditerranée. Cette piste est absolument fabuleuse…. Elle nous prendra deux jours pleins, la plupart du temps autour de 2000 mètres. De nouveau, respects, Monsieur Mouton ! Je ne sais pas comment il a fait pour trouver ces tracés. Sans doute sur Google Earth… Mais cela dû être un boulot ! De nouveau, je ne peux m’empêcher de comparer avec le Maroc : imaginez Msemrir –Agoudal par piste R704. Eh bien, ici, même genre, en cinq fois plus long. (Je dis cela pour exciter la curiosité de J. Thomas, inconditionnel du Maroc). Bon, sur la fin, cela devient long, d’autant plus que ne sachant pas lire le Turc, je persiste à suivre fidèlement la trace Mouton en dépit de panneaux bizarres, alors que je suis déjà en vue de Alanya, à 20 kms à vol d’oiseau d’après mon GPS. Premier problème un peu plus loin : la piste est coupée, mais il y a moyen de passer sur un remblai, avec le vide à gauche, et le vide à droite, mais praticable. Nady préfère quand même passer à pied. On continue. Quelques kms plus loin, une pelle rétro est en travers de la piste, et celle-ci est carrément coupée. On est samedi soir : pas la peine de bivouaquer sur place en attendant l’opérateur. Donc demi -tour,…. sur 15 kms. Déjà pour faire demi-tour sur une piste de 4 m avec un camion de 5,5m, c’est pas folichon…Ensuite, nouvelle tentative sur une autre piste qui a l’air de descendre dans la bonne direction. Dix kms plus loin, nous tombons sur des forestiers en train de charger un pick-up. Pas moyen de passer. On attend donc la fin du chargement. Un des Turcs en question parle un peu anglais et nous explique gentiment que la piste descend bien vers Alanya. Il nous offre des poires pour s’excuser. Une demi-heure plus tard, la nuit est tombée, et on repart. Et là, cela devient du grand cirque, au bord du précipice… Le pick-up fonce un peu à travers tout, nous suivons à l’aveuglette. Les branches griffent la cellule. Il y a des buissons plein la piste, qui d’ailleurs me semble plus étroite que mon camion, mais cela passe, je ne sais pas trop comment. Dans le noir. A plusieurs reprises, nous devons avoir eu une roue dans le vide. Sûr qu’en plein jour, c’eût été la panique. Finalement, nous débouchons à l’arrière d’un village, comme si nous sortions d’un arrière jardin. Quelques morceaux d’asphalte pourri apparaissent: cela sent de nouveau la civilisation. Pour faire court, une heure après, nous arrivons dans Alanya, dans un trafic dingue de samedi soir, avec des furieux qui déboulent de partout. Cela change, après deux jours de pistes…Nous rejoignons enfin l’autoroute côtière et par chance, nous trouvons un endroit où bivouaquer à 2 kms de l’autoroute, près de Menavgat. Nous sommes cre-vés…
Ensuite, nous longeons la côte. Béton et autres horreurs. Passé Antalya, cela redevient bien.
Nous traînons près de Kas, puis nous baladons jusqu’à Knidos au bout de la presqu’île de Datça, toujours relativement sauvage. Superbes coins de bivouacs, notamment une crique à deux kms du site dorien de Knidos. Mérous grillés dans un resto sur le port de Datça, avec un petit vin blanc local qui m’a franchement surpris. Les vacances…
Ensuite, routes vers Izmir, Canakkale, et enfin Stavros où un mois plus tard la mer est toujours à 26°C (en dessous, je n’entre pas dans l’eau…). De nouveau, 48 heures de repos sur « notre » plage de galets.
Puis le retour et la pénitence : Macédoine, Serbie, Croatie, Slovénie, Autriche et Allemagne….Plus jamais ! La prochaine fois, je reprends le bateau Ancône-Igoumenitsa. C’est juré. Des autoroutes inconfortables, des péages en tous genres, vignettes, monnaies de singe, des bâtiments délabrés, des paysages sans intérêts… Sans compter la tronche des Serbes ou des Croates : les seuls que vous voyez sont des flics, des douaniers ou des employés des péages. Déjà rien de sympa au départ. Ensuite des femmes qui ressemblent à des hommes, et des hommes qui ressemblent à des gardiens de prisons ou des tueurs… Je suis sûr qu’il y a mieux dans ces pays, comme partout, mais cela change brutalement de la gentillesse turque ou de la nonchalance grecque ou macédonienne, c’est clair ! Bon, j’ai eu aussi de petits problèmes avec un flic croate, ce qui me rend teigneux… N’empêche !
Pour la petite histoire, nous avons été arrêtés deux fois une bonne demi-heure sur l’autoroute avant Zagreb. Je vous dis pas les files… Raison : déminage à proximité de l’autoroute.
Enfin, nous retrouvons une petite pluie à Belgrade, puis un crachin en Autriche, la pluie en Allemagne et enfin, la drache nationale en Belgique. Et depuis lors, il pleut sans arrêt…. Nous sommes bien rentrés, c’est sûr. Après 4 semaines sans voir de nuages…
Conclusion :
Un de nos plus beaux voyages 4x4. La Turquie est décidément une alternative plus que valable aux destinations classiques comme le Maroc. En plus, c’est immense, et il y a à voir partout. Je suis sûr que si quelques co-listiers éclairés, comme Mouton, se déclaraient, il y aurait moyen de créer une pistothèque digne de Gandini, version turque.
Pour ma part, j’ai enregistré mes traces au jour le jour. Il y a donc mon endroit de bivouac au bout de chaque trace journalière. Pour ceux qui veulent… (370 Ko en Garmin, 1740 Ko en GPX). Contactez-moi en direct à l’adresse Fanon.Luc@base.be si vous êtes intéressés, mais pas pressés (je repars 4 semaines en novembre…)
Pour les cartes, il n’y a pas grand-chose sur le net, si ce n’est : http://garmin.openstreetmap.nl/" qui marche généralement bien.
Mais surtout, pour OZI, il y a http://www.mi4x4.com/cartografia.asp" : Turquie Ouest et Est (2 cartes)
Enfin, la perle, à mon avis, c’est Turquie topo en 10 pavés, depuis la Slovénie-Grèce, jusqu’à la Turquie-Arménie, pour OZI. C’est désormais impossible à retrouver sur le net depuis que MEGAUPLOAD a été fermé. Je les ai en fichiers .RAR, mais il y en a pour 4 à 5000 Mo. Cela fait beaucoup par mail… Peut-être certains savent-ils où les trouver actuellement ?
Autres renseignements pratiques :
Le diesel s’appelle MOTORIN, en Turquie. Il est à max 4.40 TL sur la côte, mais on en trouve jusqu’à 3.60 TL à l’intérieur du pays (Konya, Aksaray, e.g.). Il faut chercher, cela vaut la peine pour de gros pleins. Cela nous fait, au change de 2.3 TL pour 1€, entre 1.913 €/litre et 1.565 €/litre. Cher quand même… Dans mon cas, pour 10500 kms environ, le budget fuel aura été de +/- 2000 € au total. Evidemment, mon camion HZJ79 consomme ses 13 litres allègrement, en conduite pépère, ce qui n’est pas le cas des pick-up récents.
La carte EUROCARD MASTERCARD est de plus en plus acceptée. Mais méfiance tout de même : il m’est arrivé de me faire rejeter par le terminal qui n’acceptait que des cartes « turques »… Il est possible de vérifier, avant le plein, que votre carte sera acceptée.
Pour bivouaquer, lors de mon premier voyage en Turquie, je prenais mille précautions. Maintenant, quand c’est l’heure de se poser, je vise le chemin de traverse le plus sauvage, le champ fraichement moissonné (ils sont immenses…) ou la forêt la plus proche, et je trouve systématiquement un coin désert. De toute façon, jamais on ne vous importunera. Si je cherche des coins déserts, c’est autant pour ne pas gêner que pour ne pas systématiquement être invité à un « chai » qui peut toujours se prolonger de façon tout à fait inattendue (repas, etc…). Et c’est toujours difficile de refuser…C’est à mon avis, un des pays les plus faciles dans le domaine du bivouac sauvage. Et jamais, le moindre chouffeur… si vous voyez ce que je veux dire. Discrétion totale.
Excusez mes commentaires bruts de décoffrage et mes photos peu triées. J’ai fait très vite…
Cordialement,
Luc
Chaque fois, nous avons été subjugués par la beauté des paysages, l’accueil et la gentillesse de Turcs, et les facilités de bivouacs, ravitaillement, eau, qualité des pistes, etc… Le pays idéal pour des nomades de notre genre. Mieux qu’au Maroc ! Nous sommes pourtant des passionnés de ce pays, aussi.
Lorsque j’ai découvert le reportage de Mouton sur ce site, j’ai été intéressé par son approche moins convenue que celle de beaucoup de « touristes », et surtout par les pistes de forêt et de montagne qu’il avait pratiquées en dehors de chemins touristiques les plus courus.
Nous sommes donc partis au petit bonheur, en se disant qu’on verrait bien ce que donneraient ces pistes. Eh bien, nous fûmes ravis… En voici le résumé, voir https://picasaweb.google.com/lfalfa7/Turquie2012LN" pour les photos (…et voir Le Routard et Lonely Planet pour les autres détails pour les sites les plus courus).
Départ le 2 septembre de notre maison en Belgique, traversée (pénible car longue et inconfortable) de l’Allemagne, Autriche, Slovénie, Croatie, Serbie, Macédoine, et Grèce, pour arriver le 4 au soir sur un spot que nous connaissons à proximité de Stavros, à l’est de Thessaloniki : une plage de galets, déserte, parfaite, accessible aux 4x4. Le rêve, quoi… Se réveiller à 10 mètres d’une mer d’huile, face au soleil levant, sans un nuage… Nous les Belges, on apprécie. Du coup nous resterons un jour de plus, histoire de se reposer des trois premiers jours de galère et des 2400 kms déjà abattus.
Auparavant, nous avions bivouaqué sur une aire d’autoroute en Autriche, relativement tranquille et sécure, puis près d’un soi-disant motel, dans un terrain vague le long de l’autoroute au sud de Belgrade.
De Stavros, nous reprenons l’autoroute vers Alexandropoli, puis Cannakale sur le détroit des Dardanelles. Nous bivouaquerons dans un champ fauché, au milieu d’une forêt de pins. Nous passons le bac sans histoire, puis descendons le long de la côte (Troie, etc…) sans grand intérêt jusque la petite ville anciennement grecque de Assos, avec son minuscule port, 2 kms plus loin. Un bijou, mais assez couru, à voir le nombre de restaurants et auberges (de charme) les pieds dans l’eau.
Nous bivouaquons un peu plus loin au bord de la mer, entre deux villas. Manifestement tout le littoral est privé, dans ce coin. Nous zappons Bergame et Ephèse, connus, pour nous retrouver sur un cap venteux au possible, près de Karine, en face de Lesbos. Nous y bivouaquons, peinards, mais devons rabattre le toit de l’Azalai, tellement le vent est fort et fait bouger le camion.
Le lendemain, après avoir visité le site de Priène, superbe !, nous piquons vers le lac d’Héraklia pour attaquer deux jours de piste « Mouton ». Le site au bord du lac est original, ruines moyenâgeuses, remparts, monastères byzantins, et d’étranges tombes (lyciennes ?) creusées dans le roc. Nous bivouaquons dans un village abandonné au bout du bout de la trace « Mouton ». Attention au bord du lac : facile de s’y embourber !
De là, nous repartons par du goudron, puis des pistes de forêt dans la montagne. Il y a des ruches partout. Des apiculteurs y travaillent et semblent surpris de nous voir. Grands sourires et gestes de bienvenue (le Turc est décidément incompréhensible pour nous, dommage !). Nous tombons en pleine forêt sur un cimetière déjà photographié par Mouton, puis sur des villages pas évident à traverser. Avec un peu de vaseline, ça passe… Les pistes sont assez confortable, et bien qu’en montagne, assez sablonneuses : en fait la roche, micacée, est assez friable et s’émiette au passage des véhicules. Nous bivouaquons près d’une fontaine, dans une clairière idéalement située. A peine entend-on le muezzin au loin. Comme à plusieurs reprises, notre petit campement est traversé au crépuscule par un ou des troupeaux de chèvres ou moutons.
Pour ceux qui n’on pas encore pratiqué la Turquie, il faut savoir qu’absolument partout, on trouve des fontaines ou des sources d’eau propre et probablement potable, débitant même en fin d’été comme en ce mois de septembre. C’est très pratique, et finalement bien mieux et plus propre qu’au camping… (Pas de dentifrice inconnu collé au fond du lavabo). Pratique pour ravitailler, ou même faire sa toilette (ou celle des légumes). Souvent des gobelets sont attachés près du robinet ou du tuyau.
Respects pour Mouton ! Ses traces sont on ne peut plus fiables et pourtant à plusieurs endroits, nous sommes tombés sur des fourchettes ou des carrefours qui laissaient perplexes. Comment s’est-il débrouillé pour ouvrir cette route. En ce qui me concerne, suivre une piste sur base de la trace sous Ozi, avec les cartes détaillées que j’avais dégotées sur le net, constituait une méthode pour le moins confortable que je n’avais encore jamais pratiquée : aucun jardinage, … et aucun mérite.
Nous débouchons finalement sur la meringue de Pamukkale, que j’avais toujours refusé de visiter, vu le nombre de cars de touristes dans les parkings. Mais finalement, cette fois, au coucher de soleil, en septembre, en dehors des grandes foules, nous nous sommes décidés, et cela valait vraiment le coup. A part que cela se pratique pieds nus, et que le calcaire est relativement râpeux…. Donc, contents de remettre ses chaussures après la visite, et pieds sensibles le lendemain.
Re-pistes dans les montagnes, quelques lacs plus ou moins salés, et petit crochet par Atabey pour visiter la vieille mosquée en bois et la medersa avoisinante. Pas un chat, décor bucolique, accueil sympathique par l’imam, jardins, fontaines, une ambiance incroyable de tranquillité et de paix. Dans les murs de pierre, de nombreuses traces de sculpture antiques ou croix de Malte : récupération.
Ensuite, petit détour sur la presqu’île d’Isparta et un déjeuner à base de carpe du lac (bon), puis montée vers Aksu dans un petit coin que je connais bien dans les montagnes. Nous y resterons deux jours à flâner, bouquiner, et ne rien faire d’autre qu’un délicieux tajine d’agneau sous des milliards d’étoiles.
De là, routes vers Beysehir, Konya, le caravansérail de Sultanhani, puis retrouvailles avec la Cappadoce que nous connaissions déjà. Après avoir bivouaqué en bordure de la vallée d’Ilhara, nous zappons le triangle Nesehir, Avanos, Urgup (ajoutez des trémas un peu partout) pour visiter plus en détail Mustafapasa , ancienne ville grecque abandonnée en 1926 (superbe cathédrale orthodoxe grecque) et Ayvali, charmant village typique . Nous trouverons une petite vallée pleine de grottes, habitations troglodytes et églises peintes, hors des circuits touristiques habituels. Nous bivouaquerons donc en plein milieu de ce décor. Pas un chat.
Nous repartons ensuite plein Est vers Sivas et Divrigli. La route est longue, en pleine steppe. Pas un arbre. Nous aurons du mal à trouver un endroit de bivouac. Finalement, nous trouverons notre bonheur au bord d’une petite rivière dans un champ moissonné.
Le lendemain, nous arrivons, via Kangal (voir plus loin), à Divrigli. Nous y visiterons une mosquée et un hôpital psychiatrique du 13ème sciècle, absolument fabuleux (voir photos). Dommage que ce soit si isolé de tout autre point d’intérêt.
Nous repartons alors plein sud pour nous retrouver empêtrés dans un chantier de route (4 bandes, comme toujours) en pleine montagne. L’horreur : trous, bosses et fosses, détournements, traversées d’engins en tous genres, etc… Après quelques heures harassantes, nous en sortons, puis reprenons plein Ouest vers Elbistan.
Ce soir là, alors que nous bivouaquons en pleine pampa, nous entendons au loin les clochettes d’un troupeau de chèvres. Quelques minutes plus tard, deux énormes chiens, de véritables veaux, déboulent en grondant, l’échine hérissée, pissant un peu partout et grattant le sol de leurs pattes pour bien marquer leur territoire. Lentement, ils se sont approchés jusqu’à 5 mètres en faisant leur cinéma. Nous avons toujours eu de grands chiens à la maison, du temps où nous voyagions moins : groenendaals, bouvier bernois. Nous étions donc décidés à ne pas nous en laisser conter. Donc, pas moufter, et ne pas les regarder dans les yeux…N’empêche, mon sudoku dans une main, ma bombe au poivre dans l’autre, je n’en menais pas large. Le cinéma a duré dix minutes, puis les deux fauves, superbes bêtes, ont enfin été se coucher à 20 mètres pour continuer leur surveillance. Le lendemain matin, ils n’étaient plus là… Je vous suggère d’aller voir Google- Wikipedia, à « Kangal », et vous comprendrez… Dommage, j’ai même pas pensé faire de photos.
Quelques centaines de kms plus loin, nous passons au pied du mont Argée, près de Develi (Kayseri). Ce volcan de près de 4000 m est à l’origine de la Cappadoce : ses émissions de poussières ont un jour créé le tuf dans lequel sont creusés tous les sites de Cappadoce. Impressionnant.
Tard le soir, nous arrivons sur Nigde. Grosse ville. Echangeurs d’autoroutes. Industries. Nous sommes mal embarqués pour trouver vite et bien un endroit de bivouac. A ce moment, Nady découvre dans le Routard qu’il y a un site à visiter tout près, au monastère d’Eski Gumus. Nous nous y rendons dans l’espoir premier de trouver un parking isolé pour bivouaquer. Excellente idée. Nous tombons sur un village entourant une montagne de tuf qui semble contenir des grottes, comme en Cappadoce. Dans le noir, nous trouvons un chemin de terre escarpé et désert qui monte au sommet de ce site. Et là, nous débouchons sur un plateau déjà occupé par … un motorhome français qui a eu la même idée que nous. En fait, le lendemain, nous visitons le site et découvrons un monastère troglodyte, de loin le plus beau de Cappadoce, avec les peintures les mieux conservées que nous ayons vues. A voir.
De là, nous continuons plein Ouest, pour retrouver une piste «Mouton » au sud de Seydisehir, vers Alanya, sur la Méditerranée. Cette piste est absolument fabuleuse…. Elle nous prendra deux jours pleins, la plupart du temps autour de 2000 mètres. De nouveau, respects, Monsieur Mouton ! Je ne sais pas comment il a fait pour trouver ces tracés. Sans doute sur Google Earth… Mais cela dû être un boulot ! De nouveau, je ne peux m’empêcher de comparer avec le Maroc : imaginez Msemrir –Agoudal par piste R704. Eh bien, ici, même genre, en cinq fois plus long. (Je dis cela pour exciter la curiosité de J. Thomas, inconditionnel du Maroc). Bon, sur la fin, cela devient long, d’autant plus que ne sachant pas lire le Turc, je persiste à suivre fidèlement la trace Mouton en dépit de panneaux bizarres, alors que je suis déjà en vue de Alanya, à 20 kms à vol d’oiseau d’après mon GPS. Premier problème un peu plus loin : la piste est coupée, mais il y a moyen de passer sur un remblai, avec le vide à gauche, et le vide à droite, mais praticable. Nady préfère quand même passer à pied. On continue. Quelques kms plus loin, une pelle rétro est en travers de la piste, et celle-ci est carrément coupée. On est samedi soir : pas la peine de bivouaquer sur place en attendant l’opérateur. Donc demi -tour,…. sur 15 kms. Déjà pour faire demi-tour sur une piste de 4 m avec un camion de 5,5m, c’est pas folichon…Ensuite, nouvelle tentative sur une autre piste qui a l’air de descendre dans la bonne direction. Dix kms plus loin, nous tombons sur des forestiers en train de charger un pick-up. Pas moyen de passer. On attend donc la fin du chargement. Un des Turcs en question parle un peu anglais et nous explique gentiment que la piste descend bien vers Alanya. Il nous offre des poires pour s’excuser. Une demi-heure plus tard, la nuit est tombée, et on repart. Et là, cela devient du grand cirque, au bord du précipice… Le pick-up fonce un peu à travers tout, nous suivons à l’aveuglette. Les branches griffent la cellule. Il y a des buissons plein la piste, qui d’ailleurs me semble plus étroite que mon camion, mais cela passe, je ne sais pas trop comment. Dans le noir. A plusieurs reprises, nous devons avoir eu une roue dans le vide. Sûr qu’en plein jour, c’eût été la panique. Finalement, nous débouchons à l’arrière d’un village, comme si nous sortions d’un arrière jardin. Quelques morceaux d’asphalte pourri apparaissent: cela sent de nouveau la civilisation. Pour faire court, une heure après, nous arrivons dans Alanya, dans un trafic dingue de samedi soir, avec des furieux qui déboulent de partout. Cela change, après deux jours de pistes…Nous rejoignons enfin l’autoroute côtière et par chance, nous trouvons un endroit où bivouaquer à 2 kms de l’autoroute, près de Menavgat. Nous sommes cre-vés…
Ensuite, nous longeons la côte. Béton et autres horreurs. Passé Antalya, cela redevient bien.
Nous traînons près de Kas, puis nous baladons jusqu’à Knidos au bout de la presqu’île de Datça, toujours relativement sauvage. Superbes coins de bivouacs, notamment une crique à deux kms du site dorien de Knidos. Mérous grillés dans un resto sur le port de Datça, avec un petit vin blanc local qui m’a franchement surpris. Les vacances…
Ensuite, routes vers Izmir, Canakkale, et enfin Stavros où un mois plus tard la mer est toujours à 26°C (en dessous, je n’entre pas dans l’eau…). De nouveau, 48 heures de repos sur « notre » plage de galets.
Puis le retour et la pénitence : Macédoine, Serbie, Croatie, Slovénie, Autriche et Allemagne….Plus jamais ! La prochaine fois, je reprends le bateau Ancône-Igoumenitsa. C’est juré. Des autoroutes inconfortables, des péages en tous genres, vignettes, monnaies de singe, des bâtiments délabrés, des paysages sans intérêts… Sans compter la tronche des Serbes ou des Croates : les seuls que vous voyez sont des flics, des douaniers ou des employés des péages. Déjà rien de sympa au départ. Ensuite des femmes qui ressemblent à des hommes, et des hommes qui ressemblent à des gardiens de prisons ou des tueurs… Je suis sûr qu’il y a mieux dans ces pays, comme partout, mais cela change brutalement de la gentillesse turque ou de la nonchalance grecque ou macédonienne, c’est clair ! Bon, j’ai eu aussi de petits problèmes avec un flic croate, ce qui me rend teigneux… N’empêche !
Pour la petite histoire, nous avons été arrêtés deux fois une bonne demi-heure sur l’autoroute avant Zagreb. Je vous dis pas les files… Raison : déminage à proximité de l’autoroute.
Enfin, nous retrouvons une petite pluie à Belgrade, puis un crachin en Autriche, la pluie en Allemagne et enfin, la drache nationale en Belgique. Et depuis lors, il pleut sans arrêt…. Nous sommes bien rentrés, c’est sûr. Après 4 semaines sans voir de nuages…
Conclusion :
Un de nos plus beaux voyages 4x4. La Turquie est décidément une alternative plus que valable aux destinations classiques comme le Maroc. En plus, c’est immense, et il y a à voir partout. Je suis sûr que si quelques co-listiers éclairés, comme Mouton, se déclaraient, il y aurait moyen de créer une pistothèque digne de Gandini, version turque.
Pour ma part, j’ai enregistré mes traces au jour le jour. Il y a donc mon endroit de bivouac au bout de chaque trace journalière. Pour ceux qui veulent… (370 Ko en Garmin, 1740 Ko en GPX). Contactez-moi en direct à l’adresse Fanon.Luc@base.be si vous êtes intéressés, mais pas pressés (je repars 4 semaines en novembre…)
Pour les cartes, il n’y a pas grand-chose sur le net, si ce n’est : http://garmin.openstreetmap.nl/" qui marche généralement bien.
Mais surtout, pour OZI, il y a http://www.mi4x4.com/cartografia.asp" : Turquie Ouest et Est (2 cartes)
Enfin, la perle, à mon avis, c’est Turquie topo en 10 pavés, depuis la Slovénie-Grèce, jusqu’à la Turquie-Arménie, pour OZI. C’est désormais impossible à retrouver sur le net depuis que MEGAUPLOAD a été fermé. Je les ai en fichiers .RAR, mais il y en a pour 4 à 5000 Mo. Cela fait beaucoup par mail… Peut-être certains savent-ils où les trouver actuellement ?
Autres renseignements pratiques :
Le diesel s’appelle MOTORIN, en Turquie. Il est à max 4.40 TL sur la côte, mais on en trouve jusqu’à 3.60 TL à l’intérieur du pays (Konya, Aksaray, e.g.). Il faut chercher, cela vaut la peine pour de gros pleins. Cela nous fait, au change de 2.3 TL pour 1€, entre 1.913 €/litre et 1.565 €/litre. Cher quand même… Dans mon cas, pour 10500 kms environ, le budget fuel aura été de +/- 2000 € au total. Evidemment, mon camion HZJ79 consomme ses 13 litres allègrement, en conduite pépère, ce qui n’est pas le cas des pick-up récents.
La carte EUROCARD MASTERCARD est de plus en plus acceptée. Mais méfiance tout de même : il m’est arrivé de me faire rejeter par le terminal qui n’acceptait que des cartes « turques »… Il est possible de vérifier, avant le plein, que votre carte sera acceptée.
Pour bivouaquer, lors de mon premier voyage en Turquie, je prenais mille précautions. Maintenant, quand c’est l’heure de se poser, je vise le chemin de traverse le plus sauvage, le champ fraichement moissonné (ils sont immenses…) ou la forêt la plus proche, et je trouve systématiquement un coin désert. De toute façon, jamais on ne vous importunera. Si je cherche des coins déserts, c’est autant pour ne pas gêner que pour ne pas systématiquement être invité à un « chai » qui peut toujours se prolonger de façon tout à fait inattendue (repas, etc…). Et c’est toujours difficile de refuser…C’est à mon avis, un des pays les plus faciles dans le domaine du bivouac sauvage. Et jamais, le moindre chouffeur… si vous voyez ce que je veux dire. Discrétion totale.
Excusez mes commentaires bruts de décoffrage et mes photos peu triées. J’ai fait très vite…
Cordialement,
Luc